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Errances, Identités

Adulte, mais avec des tatouages.

Disclaimer : j’avais un truc simple à vous dire, à la base : le tatouage m’aide à trouver ma place dans la société. Mais… bah je suis partie dans les sens. Il faut croire que ce n’est pas entièrement clair dans ma tête, encore. Merci et pardon pour le boxon que constitue cet article.

Et bien sûr, je parle ici de ma relation au tatouage et de l’image que j’en ai de part mon éducation et ma propre approche. Je n’ai pas vocation à me faire porte-parole de qui que ce soit (sauf pour les citations).

Gros plan sur uen partie de mon dos nu, avec des fleurs de nénuphar roses tatouées sur fond de fourrure gris-bleu, de flammes violettes et de feuilles.
Mon Ookami par Liith Eleis

Adult or not adult ?

Je vous ai déjà parlé (probablement dans une newsletter) de ma difficulté à me considérer adulte. À 36 ans, je n’ai pas la sensation d’être adulte. Je crois que dans ma tête, je me vois encore comme une gamine ou une ado. Mais… par moment, j’ai l’impression que c’est plus profond que ça. Je ne VEUX SURTOUT PAS être adulte.

Le problème, c’est que j’arrive justement à l’âge où je SUIS ADULTE. Je fais partie de cette société et de son modèle. Je coche des étapes très classiques de l’adulting (CDI, appartement).

Je me suis politisée sur le tard et je crois que je ne sais toujours pas quoi faire de cet aspect de ma vie. Je ressens un fort sentiment de rejet envers la société actuelle, sa course en avant, son consumérisme, l’absence d’égalité entre les gens et de prise en compte de l’avenir de la planète. Il y a dans tout ça une injustice qui me fait vriller de l’intérieur.

Alors je me dis que j’ai le temps d’étudier, de comprendre le système et de chercher les meilleures armes pour le changer. Je suis jeune. J’ai la vie devant moi, non ? Si je ne suis qu’une gosse en construction, je ne suis pas coupable de laisser faire le monde autour de moi. Je ne fais pas partie du problème.

Je crois que souvent, je me hais d’être adulte. Ou peut-être que je me hais d’être une adulte intégrée, de si bien vivre dans cette société qui m’horrifie. Par facilité, par fatigue, par lâcheté.

Militant or not militant ?

Alors je cherche des moyens de refuser tout ça. Refuser de faire comme la génération d’avant qui a tout sacrifié au travail : leur temps, leur santé, leur famille et la planète. Refuser de suivre des leaders qui placent l’économie et la croissance au-dessus de l’avenir du monde et de l’humanité. Refuser de jouer le jeu du consensus et d’accepter que c’est de toute façon « le seul modèle possible » et qu’on doit faire avec. Je ne sais pas comment faire. Quand on refuse la société, on se doit d’être en lutte permanente et de refuser le confort et la sécurité qu’elle nous offre, non ? Vivre sans travail, s’installer dans une ZAD, manifester… Je n’ai pas ce genre de courage. Alors, quoi ?

C’est clairement une question pour un autre article, qui viendra quand j’aurai trouvé ne serait-ce que des débuts de réponses à cette question. Ce n’est pas encore le cas.

Et le tatouage dans tout ça ?

Revendiquer un autre modèle, ça commence peut-être simplement par revendiquer ma liberté d’être moi. Je suis autiste, LGBT, féministe, anticapitaliste… je suis tout ça en m’excusant d’être trop « normale » (la gauche caviar, comme dit ma mère. Moi, je préfère la gauche chocolat (c’est à peu près aussi mauvais pour la planète de toute façon)). Et comme toute personne qui se cherche, je cherche des modèles auxquels m’identifier, des gens de qui m’inspirer.

C’est peut-être simpliste, mais depuis quelques années, j’ai l’impression de les trouver dans le milieu du tatouage.

Tatoueur au crane tatoué et aux boucles d'oreille en forme de crane de dinosaure, en train de tatouer une cuisse très coloré d'une gueule de monstre.
Liith Eleis à l’oeuvre.

Un acte qui a encore beaucoup cette image de « rébellion », surtout lorsqu’il est grand et visible. Un acte qui était hors norme à l’époque de mes parents. Un acte qui représente une forme de réappropriation de ce physique que l’on n’a pas choisi, d’affirmation de notre identité, de nos valeurs, de nos choix. Dans une société où les corps sont trop souvent normés et catalogués (trop gros, trop noir, trop poilu, pas maquillé, pas assez viril…), je le vois comme un acte de désacralisation de notre corps qu’il faudrait entretenir et vénérer, et de rejet d’une norme trop lisse et trop homogène.

Quelqu’un sur twitter à eu une réflexion qui m’a beaucoup parlé.

Someone asked me why so many young people have tattoos and I was like « the earth is literally on fire, governments are collapsing, inflation is out of control, there’s a plague, why not have pretty picture on arm? » And he went « when you put it like that it makes perfect sense »

Jay Hulme

« Quelqu’un m’a demandé pourquoi autant de jeunes gens avaient des tatouages et j’ai répondu « la terre est littéralement en feu, les gouvernements s’effondrent, l’inflation est incontrôlable, il y a une pandémie, pourquoi ne pas avoir de jolis dessins sur les bras ? ». Il a répondu « quand tu le dis comme ça, c’est évident ».

Photo de mon dos nu, représentant un loup gris-bleuté à la fourrure de flammes qui descends au milieu d'un décors de nénuphars roses.
Mon dos, intégrale. Tatoué par Liith Eleis.

C’est pour ça que je me fais des tatouages. Parce que c’est la manière que j’ai trouvé aujourd’hui de refuser de plier. Quels regrets avoir, de toute façon ? Nous mourrons tous à la fin. Comme le dit mon tatoueur favori Liith Eleis : « On est presque à la fin du monde, alors autant s’amuser un peu avant. » (citation rapportée de mémoire, non contractuelle).

Pour ouvrir la reflexion

Une vidéo vient de m’être envoyée, plusieurs mois après la parution de cet article. Et elle résonne énormément avec son contenu. Je vous la mets donc ici, et j’ai commandé le livre de la philosophe pour approfondir !

Donc, pendant ce temps, je réfléchis à mon prochain tatouage. Mais ça aussi, c’est l’histoire d’un prochain article. Pour n’en manquer aucun, abonnez-vous à ma newsletter !

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