Vous vous demandez pourquoi les auteurs de votre connaissance passent leur temps à se plaindre des corrections? Pourquoi ce livre qu’on vous a promis et qui est terminé depuis 1 an n’a toujours pas été soumis aux éditeurs? Cet article vous apportera quelques réponses !
Apprendre à écrire :
Parce qu’écrire, c’est comme tout, cela s’apprend. Hors, il n’existe pas en France d’école ou de cours spécialisés. Du coup, apprendre à écrire, c’est souvent un cheminement solitaire, ou au mieux entouré d’une communauté d’autres apprentis auteurs ayant plus ou moins de bouteille (mais souvent beaucoup de bonne volonté).
Du coup, peut-être plus encore que dans les autres domaines, écrire s’apprend à coup d’essais et d’erreurs. Et pour se tromper, il faut d’abord faire. Dans notre cas, il faut avoir écris un livre, en entier. Il n’y a que comme ça qu’on peut réaliser tous les défauts de notre travail, non seulement dans la forme mais aussi et surtout dans le fond.
C’est ce qui fait qu’un jeune écrivain passera en général beaucoup plus de temps à corriger ses textes qu’il n’en a mis à les écrire. Parfois 2 ou 3, parfois 10 fois plus. Je ne perds pas espoir que cet état de fait s’arrange avec l’expérience. (S’il vous plait, faites que ça s’arrange!)
Pour prendre l’exemple de mon premier roman, j’ai mis 4 mois à l’écrire. Je l’ai corrigé trois fois, avant de me rendre compte qu’il était entièrement à refaire. Un an après avoir posé le point final, j’engageais donc un immense travail de réécriture. J’ai commencé il y a 8 mois, j’espère avoir terminé la première phase dans 2 à 3 mois. Puis je le ferais de nouveau relire pour une seconde passe.
Vous vous demandez peut-être si une réécriture complète n’était pas exagérée, je vais donc vous indiquer dans les grandes lignes les éléments que j’avais à retravailler. Bien sûr, il ne s’agit que de mon cas personnel. Mais je pense que beaucoup de jeunes auteurs se retrouvent confrontés à ces même défauts sur leurs premières années.
Vu la longueur de ce début d’article, je vais commencer par traiter les problèmes de forme. Je reviendrais plus longuement sur le fond dans un prochain message, car il y a encore plus à dire dessus.
Les défauts de forme :
Le tell, c’est le fait de raconter les évènements. Vous allez me dire que ça tombe bien, parce que vous essayez justement de raconter une histoire. Pourtant, l’une des règles de base que l’on retrouve dans tous les conseils d’écriture, c’est : « Show, don’t tell ! ». Autrement dit : Ne dis pas, montre !
En effet, l’un des défauts de style les plus courant des jeunes auteurs est de vouloir raconter au lecteur ce qui arrive à leurs personnages au lieu de le leur faire vivre. Ce défaut induit une distance entre le lecteur et les protagonistes. Alors qu’un auteur qui vous fait plonger dans la tête et le corps de ses personnages vous accrochera jusqu’au dernier mot.
C’est la différence qui existe entre : « X était très en colère. Il s’efforça cependant de se calmer. » et « X sentit la colère le gagner. Il serra les poings, le corps tendu de fureur. Non, je dois me calmer. » *
Les descriptions sont indispensables pour permettre à vos lecteurs de visualiser les décors dans lesquels évoluent vos personnages. Certains auteurs et lecteurs en raffolent et prennent le temps de vous détailler le moindre lieu et le moindre figurant. D’autres détestent et préfèrent laisser parler l’imagination de chacun qui situera les actions dans un univers qui lui parlera personnellement.
Aucune de ces techniques n’est meilleure que l’autre, il s’agit vraiment d’une préférence individuelle. Moi, je fais partie du second groupe. À la lecture, il n’est pas rare que je saute une partie des descriptions (de toute façon, je suis incapable de mémoriser la couleur de cheveux du héro, alors ne vous fatiguez pas pour moi). À l’écriture, je ne peux pourtant pas complètement m’en affranchir si je veux happer le lecteur et rendre les actions compréhensibles.
Quoi qu’il en soit, longue ou courte, il n’y a rien de plus ennuyeux (ni de plus tell) qu’une description mal faite. Là aussi, une description doit se vivre. Lister les éléments de décors présents n’est jamais intéressant. Ce qui l’est, c’est de montrer comment le personnage réagit, interagit avec ces éléments. C’est le principe de la description en mouvement.
C’est la différence entre « La jeune femme était petite et menue. Ses cheveux blond étaient longs, et ses yeux avaient la couleur de l’eau. » et « La jeune femme s’avança, avec une assurance qui contrastait avec sa petite taille et sa silhouette menue. Il observa les longs cheveux blonds, plus clairs encore que ceux de sa soeur. Un sourire plissa le coin de ses yeux et il y plongea, retrouvant dans ses prunelles le bleu de l’étang près de chez lui. »
Dernier élément sur les descriptions. Vos personnages, s’ils sont humains, explorent le monde à l’aide de 5 sens. Alors pourquoi ne vous limiter qu’à un seul lorsque vous évoquez les décors dans lesquels ils évoluent? Ne sous-estimez jamais l’importance d’une ambiance sonore, d’une odeur, d’une sensation sur la peau.
Les dialogues, enfin, ne sont jamais un simple enchainement de répliques. Lorsque vous parlez avec quelqu’un, vous ne vous contentez pas du sens de ses mots. Votre communication passe par le ton de vos voix, vos gestes, vos mimiques. Le langage non verbal représente plus de la moitié de la communication entre individus, qu’ils en aient conscience ou non. Ne privez pas vos lecteurs de cet élément essentiel.
« — Comment tu vas ?
— Bien.
— Vraiment ?
— Moi ça va. Mais je m’inquiète pour X. »
« — Comment tu vas ?
— Bien.
La réponse peu enthousiaste couplée à une tête de deux pieds de long ne le convainquit guère.
— Vraiment ?
Son ami le regarda et eut un sourire embarrassé. Il baissa la voix.
— Moi ça va. Mais je m’inquiète pour X. »
De plus, un dialogue n’est jamais vraiment déconnecté de ce qui entoure les protagonistes. Il ne se déroulera pas de la même manière, n’aura pas la même signification selon que vos héros seront seuls dans une petite pièce silencieuse, ou dans un bar bruyant et rempli de potentielles oreilles qui trainent.
Bon… je crois que vous ai assez embêté pour aujourd’hui. Je reviendrais donc plus tard pour développer les soucis de fond auxquels j’ai dû, en bonne jardinière amatrice **, faire face lors de mes corrections.
*Mes exemples ont été créés tout spécialement pour l’occasion. Alors ils sont bateaux, et sans doute un peu nuls. Mais je pense qu’ils permettent de mieux comprendre ce dont je parle.
**On appelle « jardinier » un écrivain qui écrit ses histoires « au fil de la plume », sans aucune préparation préalable (et souvent sans savoir où cela va le mener). Cette technique s’oppose à celle de l’architecte qui fera des plans, et ne commencera à écrire vraiment qu’une fois toute la structure de l’histoire posée.
rha la la… ces corrections… je suis en plein dedans ! Et comme je suis jardinière comme toi, ben ya plein de choses qu’il faut que je revois ou que je réécrive (notamment au début d’ailleurs..) Bon courage La Louve !
Merci, à toi aussi !
Super bien expliqué ! Je me retrouve dans ces corrections de prime jeunesse d’un écrivain. En fait aujourd’hui après avoir auto publié, je suis confronté à cinq erreurs courantes du petit nouveau : changer la première de couverture car elle n’est pas assez en adéquation avec mon thème, ajouter un sommaire, mettre le nom du livre et des chapitres en haut de chaque page et commencer un chapitre toujours sur la droite! C’est rien, des détails, mais qui font toute la différence ! Merci pour votre article par lequel j’ai bénéficié de précieux conseils!
Ahhh ! Je ne suis pas encore confrontée aux corrections éditotiales, mais je me doute qu’en auto-édition, ça doit être épique aussi les premières fois ! Bon courage pour la suite !